Re: Virginie Despentes
Posté : sam. 24 mars 2012 17:30
J'ai posté volontairement sur le topic dédié à l'émission radio, mais au cas où, je vous précise que V.D. a été interviewée par Bang Bang.
LE site de référence de la Culture Lesbienne !
http://www.univers-l.com/forum2/
Tu peux t'attaquer à King kong théorie si tu veux en savoir plus sur sa pensée. Moi c'est le premier livre que j'ai lu d'elle et ça a été une grosse claque, c'est ça qui m'a donné envie de lire ses romans et d'en savoir plus sur elle.bathilde a écrit :Bon, alors je ne sais pas comment j'ai fait pour passer à côté,mais Virginie Despentes a été ma révélation littéraire des derniers mois (même si j'ai lu pour l'instant que Teen Spirit et Apocalypse bébé). Je connais pas assez sa pensée, mais niveau style rien à redire, j'adore.
Heu, quand tu dis ça, doit-on comprendre que notre discussion par ici a eu un rôle dans ces lectures ?bathilde a écrit : Merci pour cette découverte.
Oui.Silverring a écrit :Heu, quand tu dis ça, doit-on comprendre que notre discussion par ici a eu un rôle dans ces lectures ?bathilde a écrit : Merci pour cette découverte.
Moi pas comprendre (merci de ne pas m'envoyer le relire, je suis en mode relecture d'Apocalypse Bébé)Certaines fois, je dois avouer avoir eu du mal à suivre le raisonnement à l’échelle du livre, de l’impression de retrouver des éléments contradictoires de ci, de là. Notamment sur le jeu des artifices, leur appréhension, leur compréhension. J’ai eu l’impression de passades entremêlées de rejet, d’apprentissage, de jeu, de rejet de nouveau, puis de résignation. Plutôt déroutant. Avez-vous perçu cela également ? Ai-je loupé quelque chose ?
Je suis pas sûre de mesurer la portée de l'image, mais instinctivement, elle me fait bien sourire« King Kong Théorie » est l’archétype du retour boomrang à tendance effet dominos
Percer les faiblesses des hommes, potentiels violeurs qui pouvaient lui voler sa vie – selon ses termes -, a manifestement contribué à l’aider dans sa reconstruction et à la réconcilier en un sens avec la gente masculine.Coucher avec l’ennemi - p. 63 a écrit : J’étais jusqu’alors une meuf quasiment transparente, cheveux courts et baskets sales, brusquement je devenais une créature du vice. […] Mais j’ai aussi tout de suite craint cette importance justement, qui dépassait mon entendement, mon contrôle. L’effet que ça faisait à beaucoup d’hommes était quasiment hypnotique. […] J’étais devenue un jouet géant. […] Finalement, aucun besoin d’être une mégabombasse, ni de connaître des secrets techniques insensés pour devenir une femme fatale… il suffisait de jouer le jeu. De la féminité.
Elle n’est ici clairement pas d’accord avec ces femmes aux allures d’escort-girl en CDI temps complet, qui doivent en passer par ce fameux « jeu de la féminité » cité plus haut et que VD mettait en lumière et s’appropriait avec plaisir. Ces femmes jouent le jeu que l’on attend d’elles et en tirent bénéfice jusqu’au bout. C’est une grande mascarade où tout le monde y gagne. Tout comme le jeu de la prostitution (selon le regard de VD) avec ses artifices, les attitudes qu’il faut avoir, celles qu’il ne faut pas, etc… Certes la différence est une question de liberté de son être après effort, mais pourquoi donc, si les parties sont consentantes, y trouvent leurs avantages et savent pertinemment que tout cela est un festival d’hypocrisie bi-cautionné, s’insurger de cela ?Coucher avec l’ennemi - p. 76 a écrit : Et bien qu’elles ne donnent pas clairement leurs tarifs, j’ai l’impression d’avoir connu beaucoup de putes, depuis. Beaucoup de femmes que le sexe n’intéresse pas mais qui savent en tirer profit. Qui couchent avec des hommes vieux, laids, chiantes, déprimants de connerie, mais puissants socialement. Qui les épousent et se battent pour obtenir le maximum d’argent au moment du divorce. Qui trouvent normal d’être entretenues, emmenées en voyages, gâtées. Qui voient même ça comme une réussite. C’est triste d’entendre des femmes parler d’amour comme d’un contrat économique implicite. Attendre des hommes qu’ils paient pour coucher avec elles. Ça me semble aussi glauque pour elles, qui renoncent à toute indépendance […].
… et quelques pages plus tard, VD en appelle à la compréhension et la liberté de faire commerce de ses charmes comme bon semble à chacun. Elle parle ici de la prostitution.Coucher avec l’ennemi p. 79 a écrit : Mais ce n’est pas grave, ce qui compte, c’est de colporter une seule idée : aucune femme ne doit tirer bénéfice de ses services sexuels hors le mariage. En aucun cas elle n’est assez adulte pour décider de faire commerce de ses charmes.
Retour aux origines, les artifices se sont envolés. VD en puissance !King Kong Girl – p. 116 a écrit :A Lyon, je me coupe les cheveux super courts, on m’appelle “monsieur” dans les boulangeries ou au tabac, ça ne me fait ni chaud ni froid. Les réflexions sont – “arrête de fumer ta clope comme un mec” -, la plupart du temps, culture underground, privilégiée, à l’écart, on me fout une paix royale. Ça doit se voir que ça me va très bien comme ça. C’est le punk-rock, c’est chez moi. Ça ne va durer qu’un temps.
Retour des artifices.King Kong Girl – p. 130 a écrit :ça n’a pas été une décision consciente. Plutôt un calcul de survie sociale. Limiter les mouvements, physiquement, préférer les gestes doux. Ralentir la diction. Privilégier ce qui ne fait pas peur. Devenir blonde. Refaire mes dents. Me mettre en couple, avec un homme plus vieux, plus riche, plus connu. Vouloir un enfant. Faire comme ils font. Après le scandale du film. Me fondre un peu dans leur décor. Le temps de voir. Arrêter de boire. Autant pour préserver mon look que pour éviter la désinhibition de l’alcool. Les comportements virils qui vont avec […] J’ai réintégré ma catégorie, telle que pensée dans mon nouveau milieu. Porter du rose et des bracelets brillants. J’ai vraiment fait de mon mieux, pour passer inaperçue... Ça n’a pas été neutre. C’était un affaiblissement consenti. […] Je me refais une santé mentale, dans mon ombre de blonde. Le monstre en moi ne lâche pas l’affaire.
Je pensais assez naïvement qu’étant donné que je m’accordais sur une bonne partie des points développés dans KKT, tout ceci était acquis et rodé.Silverring a écrit :Je suis pas sûre de mesurer la portée de l'image, mais instinctivement, elle me fait bien sourire« King Kong Théorie » est l’archétype du retour boomrang à tendance effet dominos