Créations personnelles

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keneddy

Re: Créations personnelles

Message par keneddy »

idée de synopsis :

Une citoyenne lambda est un jour contactée par une inconnue qui semble tout connaître d'elle, jusqu'à la moindre de ses pensées , en outre, elle s'affirme comme une alter ego sur un bon nombre de sujets, même les plus intimes.
Une rencontre extraordinaire de deux âmes soeurs ? L'ébauche d'une romance ?
Non, le début d'un cauchemar orchestré par un navigateur internet amoureux ou tout simplement psychopathe.
A moins qu'il ne s'agisse que d'une mauvaise blague de pirates informatiques désoeuvrés. ..
Quoi qu'il en soit, la mise au jour d'une réalité terrifiante : votre navigateur, sa puissance algorithmique, sont vos pires ennemis car ils savent comment devenir votre meilleur ami en établissant de vous un portrait sataniquement fidèle et qui ne peut que vous attirer.
Le Web mérite son nom !

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CuninaSpesStimula
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Re: Créations personnelles

Message par CuninaSpesStimula »

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On risque de pleurer un peu si l’on s’est laissé apprivoiser. Antoine de Saint Exupéry.

Apesanteur

Re: Créations personnelles

Message par Apesanteur »

Du haut de la chair, pareil à Gian Maria Volonté, il se lança dans un nouveau laïus :
" Les américains, au travers de Gary Cooper, et autres Burt Lancaster ou John Wayne, ont en effet politisé le western pour réaffirmer la suprématie blanche et patriarcale. Les italiens, eux, ont détourné ce vecteur pour réinventé la Comedia dell'arte : un style baroque sans manichéisme , voué à la dénonciation de l'état voyou où le clergé corrompu en est lui-même le noir hussard. Dans ce type de films: ni bons, ni méchants, seulement de minables insectes xylophages qui se débattent au milieu de la fourmilière aux allures de nécropole en devenir . Un détail m'a toujours frappé , un dialogue lors d'une pendaison , le condamné se voit décliner tous ses chefs d'inculpation et l'un d'eux est : tentative de viol sur une jeune fille de race blanche. Autrement dit, s'il s'était agi d'une vieille comanche, sa barbarie aurait été moins féroce pour un certain regard. .. "
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A l'ombre des gargouilles.
Extrait.

Apesanteur

Re: Créations personnelles

Message par Apesanteur »

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Elle demeura longtemps à observer le fameux monument depuis la coursive, cette minuscule église qui fut un dancing pendant quelque époque , avant de retrouver sa vocation première ; déjà gamine, elle l'observait longuement juchée sur une chaise bancale, près de la fenêtre de la cuisine décidément trop exiguë.
Surtout lors des offices funèbres. Souvent son sommeil fut ainsi troublé par , non pas des cauchemars , mais plus par des interrogations sur les propos hermétiques des adultes. Elle avait souvent ainsi entendu que 'le jour où tu nais, ta mort est déjà écrite dans le ciel ' ou autres étrangetés sur ' quand on meurt on monte au ciel'. Avant la terrible tempête, un gros arbre trônait au pied de ces vieilles briques plus sombres que roses désormais, et c'est sûrement en écoutant cette dernière bizarrerie qu'elle s'imaginait que sa fonction sacrée était de permettre à ces âmes de s'envoler. Elle croyait donc qu'on suspendait les cercueils à ses branches. Mais jamais elle ne vit qui que ce soit suspendre quoi que ce soit à ce gros arbre. On lui expliqua au contraire que la dernière demeure des morts était sous terre, d'où le mot 'enterrement ', que ça se passait ailleurs, loin. C'était tout de même bien curieux pour sa compréhension d'enfant peu éveillée de mettre sous terre des personnes qui dormaient avant de monter au ciel : quel drôle de cirque que de descendre pour au final s'envoler !

Quand le jour déclina, elle rejoignit son mystérieux émissaire. Il attendait à l'endroit-même où l'autre avait déliré quelques heures auparavant. Il tenait ce fameux palimpseste maudit qui avait déjà coûté tant de vies .
Elle était difficilement impressionnable, pourtant, l'effroi la saisit d'être ainsi en présence du récit du premier assassinat de l'humanité, écrit de la main même du criminel, sur la peau de sa victime, avec son propre sang. Depuis cette première épreuve, de multiples grattages avait été opérés afin de procéder à d'autres travaux d'écritures, certains sacrés, d'autres profanes.
Néanmoins, par cycles , la terrible confession réapparaissait , comme ce soir - là. ..
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(A l'ombre des gargouilles . Extrait )

Apesanteur

Re: Créations personnelles

Message par Apesanteur »

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La plupart des humains aspire tout simplement au bonheur, et peu importe, au fond, si la Vérité est plus ou moins maculée de souillures infimes ou marquées, du fait d'arrangements opaques avec la morale, la mémoire, le réalisme. Dès l'enfance, l'animal le plus créatif et insatisfait de son règne, se forge un monde confortable où ses fantasmes prennent corps en dehors de ses périodes de sommeil. Adulte, il poursuivra cette quête de bien être se dotant cette fois des outils d'une certaine réalité puisque cette période de sagesse réclame plus de tangible et moins de rêveries irréalisables. C'est une convention sociale : on frappe d'anathème celui ou celle qui refuse d'abandonner son ami imaginaire, son royaume féerique, donc, pour se préserver de toute mise aux bans, l'homme se résoud à suivre le chemin de la raison. Toutefois, à l'instar de l'enfant qu'il était, il continuera à aimer cet ami imaginaire de naguère, sous les traits d'un être fait de chair et d'os, doué de sentiments, mais toujours, il est vrai , selon les critères que son bonheur lui dicte. Tout repose donc sur une projection de soi-même et ses propres aspirations depuis toujours. Ce n'est pas l'autre que l'on aime, mais celui ou celle qu'on s'est créé(e), enfant. Ce n'est qu'illusion, au même titre que cet ami imaginaire, mais qu'importe, puisque le bonheur est là, décomplexé du moment que cet autre existe légalement, physiquement. La Vérité est donc quelque peu maltraitée dans cette tractation obscure, mais tant pis, c'est monnaie courante.

Seulement, elle n'était pas comme la plupart de ses congénères et refusait ce marché de dupes, quitte à rejeter le bonheur car la Vérité seule lui importait. C'est sûrement ce que son émissaire appréciait le plus en elle. Il la savait loyale et c'était ce qui leur fallait, en dépit de son athéisme, de ses origines. Après tout, le Vatican avait lui aussi son enfer. ..

(A l'ombre des gargouilles . Extrait )

Apesanteur

Re: Créations personnelles

Message par Apesanteur »

L'émissaire avait lui aussi un travail de couverture : il était médecin généraliste fraîchement installé au coeur-même de la cité. Certes, c'était un véritable sacerdoce pour un très jeune praticien encore tendre, en ce territoire désenchanté, tenu en otage par autant de dealers, que de prétendants aux tueries de masse, au nom d'une doctrine au dos large. Aussi, en très peu de temps, le visage du quartier s'était transformé de manière significative, pour afficher une sorte de retour au Moyen-âge, situation en parfaite inadéquation avec une volonté réelle de réhabiliter cette nouvelle Cour des Miracles .

Néanmoins, sa couverture était loin d'être aussi dangereuse que celle de sa tutrice, elle-même émissaire pour les plus hautes instances: elle était, elle, le bras droit du Roi , en personne, de ce royaume de l'opacité. Une position qui l'avait ainsi directement propulsée dans l'oeil d'un certain cyclone, qui avait quelques années auparavant défrayé la chronique criminelle.

L'émissaire avait pour sa tutrice une admiration sans borne, alors que sans le mépriser réellement, elle ne le supportait que d'une manière toute relative. Il faut dire qu'elle était incapable de travailler en équipe et de surcroît être la supérieure hiérarchique d'un quelconque assistant.
C'est donc avec une certaine surprise que le jeune médecin accueillit ses sincères félicitations quant à ses recherches rondement menées pour mettre au jour des indices de plus en plus dignes d'intérêt : petit à petit, le puzzle prenait forme.
Il détenait aussi, en plus de la terrible confession, une carte postale cruciale. Il s'agissait d'une preuve supplémentaire, relative à une rue-clef de l'énigme: située près du tribunal, elle était montante jusqu'à un point giratoire, où elle changeait de nom en descendant. Elle se nommait en effet rue de l'Homme armé, puis rue de La Hache.
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(A l'ombre des gargouilles Extrait. )

Apesanteur

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Message par Apesanteur »

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Par souci de praticité, on coupait la tête des condamnés non loin du lieu de la sentence . Des ragots prétendaient que la salaison , qui se plantait au début de la rue de l'Homme armé, tirait profit du sang versé à l'occasion des exécutions, surtout quand les cochons se faisaient maigres . De même, on affirmait que parfois le bourreau parvenait à se livrer à des simulacres de mise à mort, soudoyé par des proches de sa victime. On raconte également qu'il fut un cas plus au moins avéré où le condamné fut momentanément sauvé , pour être vendu à une troupe de théâtre. Des documents de l'époque relataient ainsi que, eu égard l'interdiction de l'Église de mettre en scène des faux-semblants, comme des prises de repas simulées, il était formellement prohibé de monter une fausse mise à mort. A telle enseigne qu'un prisonnier fut soustrait de la décapitation, acheté pour interpréter le rôle de Jésus à l'occasion des commémorations pascales .
(A l'ombre des gargouilles Extrait )

Apesanteur

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Message par Apesanteur »

L'émissaire fut ainsi nommé tuteur à son tour. Il partit donc pour l'intronisation, cependant que le pape avait démissionné.
Le jeune médecin pensa qu'il se devait avant tout de regagner le Liban , encore secoué d'avoir été obligé de la trahir, selon ses propres voeux, mais il comprit très vite ce qui l'avait poussée, elle, à exiger de lui un tel traitement : seule la mission importait.
Au fond, dans ce genre de situations, deux épilogues sont offerts : soit le suicide, la pendaison par exemple, soit la résignation et le choix d'avancer malgré tout. C'est pourquoi il remit sine die son voyage de retour au pays natal.
En réalité, jamais il ne retrouva ni l'ombre du cèdre, ni la blancheur laiteuse des monts enneigés.

Quant à L., jamais elle ne prit connaissance de la vérité et demeura persuadée d'avoir causé sa mort. Avec le jeu des remises de peine , son séjour pénitentiaire fut temporellement court. Mais ce n'était qu'une demi-vérité, là aussi : au fond d'elle, jamais la prison ne la quitterait.
Comme dans l'un de ces westerns tant adorés de son époux, la tombe sans nom était vide.
Des petits plaisants, ou des individus très renseignés, trouvèrent utile d'y graver: et in arcadia ego
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(A l'ombre des gargouilles . Fin . )

Apesanteur

Re: Créations personnelles

Message par Apesanteur »

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Le vieil homme avait alors quitté son habit, pour une tenue plus anodine , à son sens plus appropriée pour ce genre de discours, moins injurieuse :
" Vous comprendrez que ce que vous exigez de moi est tout simplement inimaginable. Néanmoins, je partage votre point de vue. Nous sommes en présence de l'éternel paradoxe de l'humanité qui veut tant savoir la Vérité, que la nier farouchement quand elle se présente toute nue, car elle remet en cause des siècles de faux-semblants. On a longtemps associé, injustement, Seth à Apophis, lui attribuant un caractère de comploteur abject, le symbole-même de l'étranger-envahisseur . Pourtant, force est de constater qu'il combattait au contraire Apophis ( l'obscurité, l'ignorance ) pour faire triompher Rê ( la lumière, la sagesse ).
Il me fait penser à un autre sauroctone fameux, d'ailleurs, plus proche de notre culture. De même, on leur a reproché d'adorer un être satanique représenté par une idole hideuse , d'autres prétendaient qu'il s'agissait plutôt d'un crâne. De qui ? Je vous laisse deviner. Après, on a cette hypothèse qu'ils vouaient surtout un culte à sophia . Quoi qu'il en soit, nous avons déjà eu dans nos rangs un abbé qui voulut révéler cette découverte. Heureusement pour nous, une simple rente lui a suffi pour qu'il taise ce secret. L'homme préfère se crever les yeux que d'embrasser la crudité de la lumière, voilà la réalité. Nous rejetons le païen, mais dans le même temps, nous adorons une croix, nous nous recueillons et allumons des photophores aux pieds d'icônes censées représentées des saints. Vous saviez que certaines représentations de martyrs ont surtout servi de prétexte à la libre circulation de scènes de nus? Biensûr que vous le savez, comme vous ne serez pas étonnée que bon nombre de prostituées du port a été choisi pour être le modèle de Marie. Rien n'est aussi simple qu'il n'y paraît. Vous êtes d'ailleurs la première à le savoir, n'est ce pas ? Vous êtes ici, là-bas, morte, pour certains. Votre sang-même est la parfaite contradiction de votre tâche. Et pourtant, vous êtes en train de tenter de me persuader de le réhabiliter. C'était un acte d'amour et ça, je doute que tous ces milliers de fidèles le comprendront. Il a endossé ce costume parce qu'il l'aimait, et peu importait si pour le regard de tous il s'agissait de traîtrise. "
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( A l'ombre des gargouilles . Extrait )

Apesanteur

Re: Créations personnelles

Message par Apesanteur »

La tutrice convoqua l'émissaire; dès son arrivée, elle lui tendit un simple carré de papier jaune . Il en fut visiblement bouleversé :
" Vos codes d'accès pour diffuser ceci ? ! Mais c'est votre arrêt de mort! Dès qu'ils en prendront connaissance, ils auront votre couverture et tout sera fini! Hors de question ! Et pourquoi moi?!"

Elle ne se retourna pas pour lui répondre, face à l'autel:

" Parce ce que vous me devez obéissance. "

Il voulut l'obliger à le regarder en l'empoignant, mais elle lui flanqua avec la même froideur détachée un violent coup de coude qui le propulsa à terre. Toujours de dos, elle poursuivit :

" Si vous préférez, dites-vous que c'est par amour : quand on s'arrange avec sa propre conscience, ça passe toujours mieux. Hâtez-vous. Je l'aurais bien fait moi-même mais nous savons tous deux que c'est impossible. Malgré toutes les légendes que les midinettes m'attribuent, je n'ai pas le don de bilocation. Je serai alors en leur présence, l'un d'eux aura les yeux rivés sur son écran, lira votre message, et nul doute qu'il concluera à un simple fait de trahison. C'est une chanson qui m'a toujours attirée et intriguée. Quelle ironie. Vous saviez que les chants qui s'evadaient des plantations de coton étaient en réalité des messages cryptés pour aider les fugitifs à échapper à la meute ? "
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( A l'ombre des gargouilles Extrait. )

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