Le prisme de la rime... Poésie lesbienne

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Clieuterpe
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Re: Le prisme de la rime...

Message par Clieuterpe »

:D :D :D
Rhooo... Non, on terrorise Arizona ?!?!
Mais non bien sûr, on est d'accord avec toi en plus !!!
Baudelaire était pas très gay friendly, j'en conviens... (wouahah, je crois que si n'importe quel prof de littérature lit ma phrase précédente, il décède... Mais j'aime bien les anachronismes... Déformation professionnelle de l'apprenti historienne... :twisted: )

Et en ce qui concerne Verlaine, je suis aussi tout à fait d'accord avec toi.
Avec les deux poèmes issus de Parallèlement et traitant du lesbianisme, on a dans un cas la version "Sappho-hétéro-refoulée-frustrée-par-un-homme-qui-rejette-les-femmes-plouf-dans-l'eau" (Sappho, "Les Amies") ; et dans l'autre un grand délire érotique façon fantasme masculin sur la sexualité lesbienne (Ballade Sappho).

Donc là pour le coup, du mauvais Verlaine, d'autant plus que l'écritue est assez fade, ce qu'on ne pouvait quand même pas reprocher à Baudelaire qui, lorsqu'il choisit ou exploite mal ses sujets, sait au moins sublimer un peu la poésie...

* C'était la "Minute Militante" offerte par l'Amicale des Amies de Baudelaire * :D :D :D :D :D :D :D


Pour celle qui auraient envie de découvrir les poèmes de Verlaine précédemment cités, je joins les textes...

Sappho, "Les Amies"

Furieuse, les yeux caves et les seins roides,
Sappho, que la langueur de son désir irrite,
Comme une louve court le long des grèves froides,

Elle songe à Phaon, oublieuse du Rite,
Et, voyant à ce point ses larmes dédaignées,
Arrache ses cheveux immenses par poignées ;

Puis elle évoque, en des remords sans accalmies,
Ces temps où rayonnait, pure, la jeune gloire
De ses amours chantés en vers que la mémoire
De l'âme va redire aux vierges endormies :

Et voilà qu'elle abat ses paupières blêmies
Et saute dans la mer où l'appelle la Moire, -
Tandis qu'au ciel éclate, incendiant l'eau noire,
La pâle Séléné qui venge les Amies.




Ballade Sappho

Ma douce main de maîtresse et d’amant
Passe et rit sur ta chère chair en fête,
Rit et jouit de ton jouissement.
Pour la servir tu sais bien qu’elle est faite,
Et ton beau corps faut que je le dévête
Pour l’enivrer sans fin d’un art nouveau
Toujours dans la caresse toujours prête.
Je suis pareil à la grande Sappho.

Laisse ma tête errant et s’abîmant
À l’aventure, un peu farouche, en quête
D’ombre et d’odeur et d’un travail charmant
Vers les saveurs de ta gloire secrète.
Laisse rôder l’âme de ton poète
Partout par là, champ ou bois, mont ou vau,
Comme tu veux et si je le souhaite.
Je suis pareil à la grande Sappho.

Je presse alors tout ton corps goulûment,
Toute ta chair contre mon corps d’athlète
Qui se bande et s’amollit par moment,
Heureux du triomphe et de la défaite
En ce conflit du cœur et de la tête.
Pour la stérile étreinte où le cerveau
Vient faire enfin la nature complète
Je suis pareil à la grande Sappho.

Prince ou princesse, honnête ou malhonnête,
Qui qu’en grogne et quel que soit son niveau,
Trop su poète ou divin proxénète,
Je suis pareil à la grande Sappho.


Voilà de quoi vous faire votre idée propre... ;)
" Maudit soit à jamais le rêveur inutile,
Qui voulut le premier, dans sa stupidité,
S'éprenant d'un problème insoluble et stérile,
Aux choses de l'amour mêler l'honnêteté ! "
Femmes Damnées II, C. Baudelaire (Les Fleurs du Mal)

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Mantine
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Re: Le prisme de la rime...

Message par Mantine »

Bonjour!

Merci de nous faire découvrir ces textes magnifiques.
J'aurai du mal à citer le nom de poétesses lesbiennes c'est donc avec plaisir que je vais pouvoir combler cette lacune.
J'aime bien la poésie mais je connais plutôt des poèmes d'hommes chantant les louanges des femmes.

En voici un qui m'a beaucoup touché quand je l'ai découvert :
Mon âme a son secret, ma vie a son mystère
Un amour éternel en un moment conçu
Le mal est sans espoir, aussi j'ai du le taire,
Et celle qui l'a fait n'en a jamais rien su.

Hélas! j'aurai passé près d'elle inaperçu,
Toujours à ses côtés, et pourtant solitaire;
Et j'aurai jusqu'au bout fait mon temps sur la terre,
N'osant rien demander et n'ayant rien reçu.

Pour elle, quoique Dieu l'ait faite douce et tendre,
Elle suit son chemin, distraite et sans entendre
Ce murmure d'amour élevé sur ces pas.

A l'austère devoir pieusement fidèle,
Elle dira, lisant ces vers tout remplis d'elle;
"Quelle est donc cette femme?" et ne comprendra pas.

de Félix Arvers "Mes heures perdues"

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Rosa barb
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Re: Le prisme de la rime...

Message par Rosa barb »

oh, merci pour ce topic!
j'ai lu Sappho pour la première fois il y a quelques jours et j'ai adoré. Son "hymne à Aphrodite" est génial, je l'ai lu et relu. C'est fou, 2000 ans nous sépare d'elle et pourtant j'arrive à ressentir ce qu'elle écrit comme si elle m'était contemporaine. Sinon, je ne connais pas de poétesse lesbienne mais pour moi, la poésie se trouve aussi dans la musique et je trouve les textes d'Anatomie Bousculaire particulièrement beaux.
passion de l'âme, tolérance du coeur et humour des mots

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Clieuterpe
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Re: Le prisme de la rime...

Message par Clieuterpe »

Je suis contente que ce topic te plaise Rosa Barb !
Je l'avais un peu laissé de côté mais je vais le reprendre... ;)

En effet l'oeuvre de Sappho est très intéressante et, encore aujourd'hui, elle touche toujours...

Pour ce qui est des autres poétesses lesbiennes, je vous mets quelques extraits de Renée Vivien, dont j'ai déjà parlé ici et qui reste, vraiment, l'une de mes préférées... :oops:
Sa langue est d'une beauté et d'un raffinement rares pour l'oeuvre d'une femme de l'époque (tout début XXe). Elle sait ciseler ses vers et en faire surgir une musicalité et une force d'envoutement sans pareil.
En réalité, sa poésie est assez libre. Et pour cause : elle n'écrit pas comme une femme de son temps, mais plutôt comme un homme d'alors.
A l'image de sa vie. Libre et à l'imitation des hommes. Marginale aussi.
C'est ce qui lui a permis des audaces de ton et d'écriture qu'elle n'aurait pu envisager si elle s'était conformée à son rôle de "femme-artiste" fin de siècle, bien sage loin des quartiers lesbiens de la rive gauche.
Mais elle a osé.
Parler des femmes, et ça en valait le coup...

Je vous laisse savourer...


La Pleureuse

Elle vend aux passants ses larmes mercenaires,
Comme d’autres l’encens et l’odeur des baisers.
L’amour ne brûle plus dans ses yeux apaisés
Et sa robe a le pli rigide des suaires.

Son deuil impartial, à l’heure des sommeils,
Gémit sur les anciens aux paupières blêmies
Et sur le blanc repos des vierges endormies,
Avec la même angoisse et des gestes pareils.

Le vent des nuits d’hiver se lamente comme elle,
Pleurant sur les pervers et les purs tour à tour,
Car elle les confond dans un unique amour
Et verse à leur néant la douleur fraternelle.

Les jours n’apportent plus, dans leurs reflets mouvants,
Qu’un instant de parfum, de beauté, d’allégresse,
A son âme qu’un râle inexorable oppresse,
Lasse de la souffrance ardente des vivants.

Vers le soir, quand décroît l’odeur des ancolies
Et quand la luciole illumine les prés,
Elle s’étend parmi les morts qu’elle a pleurés,
Parmi les rois sanglants et les vierges pâlies.

Sous les cyprès qui semblent des flambeaux éteints,
Elle vient partager leur couche désirable,
Et l’ombre sans regrets des sépulcres l’accable
De sanglots oubliés et de désirs atteints.

Elle y vient prolonger son rêve solitaire,
Ivre de vénustés et de vagues chaleurs,
Et sentir, le visage enfiévré par les fleurs,
D’anciennes voluptés sommeiller dans la terre.





Les Amazones

On voit errer au loin les yeux d’or des lionnes...
L’Artémis, à qui plait l’orgueil des célibats,
Qui sourit aux fronts purs sous les pures couronnes,
Contemple cependant sans colère, là-bas,
S’accomplir dans la nuit l’hymen des Amazones,
Fier, et semblable au choc souverain des combats.

Leur regard de dégoût enveloppe les mâles
Engloutis sous les flots nocturnes du sommeil.
L’ombre est lourdes d’échos, de tiédeurs et de râles...
Elles semblent attendre un frisson de réveil.
La clarté se rapproche, et leurs prunelles pâles
Victorieusement reflètent le soleil.

Elles gardent une âme éclatante et sonore
Où le rêve s’émousse, où l’amour s’abolit,
Et ressentent, dans l’air affranchi de l’aurore,
Le mépris du baiser et le dédain du lit.
Leur chasteté tragique et sans faiblesse abhorre
Les époux de hasard que le rut avilit.

« Nous ne souffrirons pas que nos baisers sublimes
Et l’éblouissement de nos bras glorieux
Soient oubliés demain dans les lâches abîmes
Où tombent les vaincus et les luxurieux.
Nous vous immolerons ainsi que des victimes
Des autels d’Artémis au geste impérieux.

« Parmi les rayons morts et les cendres éteintes,
Vos lèvres et vos yeux ne profaneront pas
L’immortel souvenir d’héroïques étreintes.
Loin de la couche obscène et de l’impur repas,
Vous garderez au cœur nos tenaces empreintes
Et nos soupirs mêlés aux soupirs du trépas ! »


(Extraits du recueil Cendres et Poussières, 1902)
" Maudit soit à jamais le rêveur inutile,
Qui voulut le premier, dans sa stupidité,
S'éprenant d'un problème insoluble et stérile,
Aux choses de l'amour mêler l'honnêteté ! "
Femmes Damnées II, C. Baudelaire (Les Fleurs du Mal)

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Rosa barb
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Re: Le prisme de la rime...

Message par Rosa barb »

en fait, j'ai un peu menti. Je connais des poétesses lesbiennes, il y en a d'ailleurs qui ont publiés leurs textes dans le topic "créations personnelles". De plus, comme je suis une habituée de Mytexte, je peux vous dire que derrière le pseudo de l'auteur malone (et le mien X5babou) se cachent des lesbiennes. Malone écrit des textes assez violent mais très émouvant. Elle écrit en se faisant passée pour un mec mais il s'agit bien d'une demoiselle.
Voilà alors si ça vous dit, aller la découvrir!
passion de l'âme, tolérance du coeur et humour des mots

lesbionic
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Re: Le prisme de la rime...

Message par lesbionic »

Le blog de Marie Loustau, la policière poète, parce que c'est bien beau...
J'ai rêvé, j'ai eu foi, j'ai tellement aimé
Que je ne suis plus de ce monde

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titidark
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poèmes lesbiens

Message par titidark »

Quelqu'un connait des auteures qui publient des poèmes lesbiens, ou si vous connaissez des écrivains célèbres qui en ont écrit ou qui étaient ambigues ?
Tu m'apportes tellement plus que ce que tu ne crois...
https://www.wattpad.com/user/titidark

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Be-yourself
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Re: poèmes lesbiens

Message par Be-yourself »

Je ne connais que Renée Vivien, qui a vraiment de très jolis poèmes! Si tu veux, tu peux les lire sur wikisource ;)
" Far away there in the sunshine are my highest aspirations. I may not reach them, but I can look up and see their beauty, believe in them, and try to follow where they lead." [ Louisa May Alcott ]

Michelle Paris
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Re: poèmes lesbiens

Message par Michelle Paris »

titidark a écrit :Quelqu'un connait des auteures qui publient des poèmes lesbiens, ou si vous connaissez des écrivains célèbres qui en ont écrit ou qui étaient ambigues ?
J'ai fusionné dans le fil qui en parlait et déja tu peux avoir quelques pistes...

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titidark
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Re: Le prisme de la rime...

Message par titidark »

Clieuterpe a écrit ::D :D :D
Rhooo... Non, on terrorise Arizona ?!?!
Mais non bien sûr, on est d'accord avec toi en plus !!!
Baudelaire était pas très gay friendly, j'en conviens... (wouahah, je crois que si n'importe quel prof de littérature lit ma phrase précédente, il décède... Mais j'aime bien les anachronismes... Déformation professionnelle de l'apprenti historienne... :twisted: )

Et en ce qui concerne Verlaine, je suis aussi tout à fait d'accord avec toi.
Avec les deux poèmes issus de Parallèlement et traitant du lesbianisme, on a dans un cas la version "Sappho-hétéro-refoulée-frustrée-par-un-homme-qui-rejette-les-femmes-plouf-dans-l'eau" (Sappho, "Les Amies") ; et dans l'autre un grand délire érotique façon fantasme masculin sur la sexualité lesbienne (Ballade Sappho).

Donc là pour le coup, du mauvais Verlaine, d'autant plus que l'écritue est assez fade, ce qu'on ne pouvait quand même pas reprocher à Baudelaire qui, lorsqu'il choisit ou exploite mal ses sujets, sait au moins sublimer un peu la poésie...

* C'était la "Minute Militante" offerte par l'Amicale des Amies de Baudelaire * :D :D :D :D :D :D :D


Pour celle qui auraient envie de découvrir les poèmes de Verlaine précédemment cités, je joins les textes...

Sappho, "Les Amies"

Furieuse, les yeux caves et les seins roides,
Sappho, que la langueur de son désir irrite,
Comme une louve court le long des grèves froides,

Elle songe à Phaon, oublieuse du Rite,
Et, voyant à ce point ses larmes dédaignées,
Arrache ses cheveux immenses par poignées ;

Puis elle évoque, en des remords sans accalmies,
Ces temps où rayonnait, pure, la jeune gloire
De ses amours chantés en vers que la mémoire
De l'âme va redire aux vierges endormies :

Et voilà qu'elle abat ses paupières blêmies
Et saute dans la mer où l'appelle la Moire, -
Tandis qu'au ciel éclate, incendiant l'eau noire,
La pâle Séléné qui venge les Amies.




Ballade Sappho

Ma douce main de maîtresse et d’amant
Passe et rit sur ta chère chair en fête,
Rit et jouit de ton jouissement.
Pour la servir tu sais bien qu’elle est faite,
Et ton beau corps faut que je le dévête
Pour l’enivrer sans fin d’un art nouveau
Toujours dans la caresse toujours prête.
Je suis pareil à la grande Sappho.

Laisse ma tête errant et s’abîmant
À l’aventure, un peu farouche, en quête
D’ombre et d’odeur et d’un travail charmant
Vers les saveurs de ta gloire secrète.
Laisse rôder l’âme de ton poète
Partout par là, champ ou bois, mont ou vau,
Comme tu veux et si je le souhaite.
Je suis pareil à la grande Sappho.

Je presse alors tout ton corps goulûment,
Toute ta chair contre mon corps d’athlète
Qui se bande et s’amollit par moment,
Heureux du triomphe et de la défaite
En ce conflit du cœur et de la tête.
Pour la stérile étreinte où le cerveau
Vient faire enfin la nature complète
Je suis pareil à la grande Sappho.

Prince ou princesse, honnête ou malhonnête,
Qui qu’en grogne et quel que soit son niveau,
Trop su poète ou divin proxénète,
Je suis pareil à la grande Sappho.


Voilà de quoi vous faire votre idée propre... ;)
Je pense pas que Verlaine ai écrit ce poème à la manière d'un fantasme, étant donné qu'il était homosexuel lui même, je ne pense pas qu'il ai des fantasmes hétéros.... il traite juste de l'homosexualité point... enfin je pense en tout cas, je peux me tromper après lol
Tu m'apportes tellement plus que ce que tu ne crois...
https://www.wattpad.com/user/titidark

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