Re: La visibilité lesbienne progresse-t-elle dans les séries
Posté : jeu. 3 nov. 2011 21:30
Bonsoir Feest,
J'aime beaucoup ta question : c'est vrai qu'après tout, on pourrait se demander si on n'en demande pas trop aux séries dont le but n'est évidemment pas de faire l'éducation de la population sur l'homosexualité. En même temps, le débat du départ est plus large comme tu le dis et je ne suis pas sûre que le glissement soit évitable. En effet, la visibilité et la discussion sur la visibilité peuvent au départ se restreindre à ce qu'on voit sur nos écrans : quels types de personnages ? quels types de couples ? quels types de familles ? quelles tranches d'âges et j'en passe beaucoup d'autres.
Mais si la question de la visibilité compte, c'est parce que nous sommes dans des sociétés de la représentation - une représentation qui au niveau politique est réalisée au moyen des élections. Tout le combat vient de là me semble-t-il. Quand les hommes écrivaient dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen le 26 août 1789 que les hommes naissent libres et égaux, ils ont la prétention de représenter tous les hommes, sauf qu'ils en oublient les femmes. D'où la réaction d'une Olympe de Gouges qui présente une Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Un groupe pour exister en société, avoir des droits, doit avoir une représentation. Et cela passe par la question initiale de la visibilité.
On peut me dire que c'est en demander beaucoup aux séries qui ont effectivement un objectif d'abord commercial : le divertissement n'est présent que parce qu'il est rentable et que ce format fonctionne encore (mais en se cassant la figure à l'évidence en ce moment). Le divertissement reflète un niveau de conscience d'une société et lui propose des amusements. Il se trouve qu'en ce moment, les homos sont des personnages de plus en plus présents.
Cela peut s'expliquer de plusieurs manières : d'abord que les homosexuels sont un segment désormais reconnu du public "bankable" ; ensuite parce que le public plus large peut se montrer curieux ou indifférents ou même très critiques - dans tous les cas, cela ne peut que profiter aux diffuseurs car la polémique a plutôt tendance à attirer le public.
Sur le cas "Otalia", je pense que les homosexuelles américaines ont vraiment beaucoup misé sur ce soap parce qu'il traitait effectivement le couple d'Olivia et Natalia comme Joey et Dawson, en faisant trainer en longueur pour faire durer le plaisir. Je ne pense pas que ce soit de l'intransigeance, mais de l'impatience, de l'engouement et au final une appropriation totale de la série - que montrent l'ensemble des montages vidéos et des fanfics sur ce couple.
Car la question que moi je me pose, c'est évidemment comment cette histoire a-t-elle été vue par les téléspectateurs ? Au delà, ou en deçà ou indépendamment des intentions de départ, la visibilité produit des effets parfois inattendue. Y compris auprès des publics lesbiens. Il serait en effet assez vain de considérer que nous voyons toutes les choses de la même façon.
Pour autant, en la matière, et même si ce que je dis n'est pas consensuel, je ne pense pas que toutes les conceptions se valent. Je ne remets pas en cause ici la liberté d'opinion ni la liberté d'expression, mais si tout peut se dire, tout ne se vaut pas.
En l'occurrence, je pense que si nous sommes toutes sensibles sur le forum à la question de la visibilité des lesbiennes dans le monde de la culture, ce n'est pas seulement parce qu'on veut se voir représenter et se reconnaître dans des oeuvres, mais aussi parce que la visibilité permet d'exister dans nos sociétés de représentation, en Occident, depuis le XVIIIe siècle.
Désolée d'avoir été un peu longue et peut-être même pas très claire. En bref, sans parler d'intransigeance, je suis d'accord avec ton idée finale de vigilance mais je ne suis pas d'accord avec toi quand tu dis que les séries n'auraient aucune portée didactique au seul titre que leur visée serait le divertissement. Il y a les intentions de représentation et les réceptions de cette représentation.
J'aime beaucoup ta question : c'est vrai qu'après tout, on pourrait se demander si on n'en demande pas trop aux séries dont le but n'est évidemment pas de faire l'éducation de la population sur l'homosexualité. En même temps, le débat du départ est plus large comme tu le dis et je ne suis pas sûre que le glissement soit évitable. En effet, la visibilité et la discussion sur la visibilité peuvent au départ se restreindre à ce qu'on voit sur nos écrans : quels types de personnages ? quels types de couples ? quels types de familles ? quelles tranches d'âges et j'en passe beaucoup d'autres.
Mais si la question de la visibilité compte, c'est parce que nous sommes dans des sociétés de la représentation - une représentation qui au niveau politique est réalisée au moyen des élections. Tout le combat vient de là me semble-t-il. Quand les hommes écrivaient dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen le 26 août 1789 que les hommes naissent libres et égaux, ils ont la prétention de représenter tous les hommes, sauf qu'ils en oublient les femmes. D'où la réaction d'une Olympe de Gouges qui présente une Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Un groupe pour exister en société, avoir des droits, doit avoir une représentation. Et cela passe par la question initiale de la visibilité.
On peut me dire que c'est en demander beaucoup aux séries qui ont effectivement un objectif d'abord commercial : le divertissement n'est présent que parce qu'il est rentable et que ce format fonctionne encore (mais en se cassant la figure à l'évidence en ce moment). Le divertissement reflète un niveau de conscience d'une société et lui propose des amusements. Il se trouve qu'en ce moment, les homos sont des personnages de plus en plus présents.
Cela peut s'expliquer de plusieurs manières : d'abord que les homosexuels sont un segment désormais reconnu du public "bankable" ; ensuite parce que le public plus large peut se montrer curieux ou indifférents ou même très critiques - dans tous les cas, cela ne peut que profiter aux diffuseurs car la polémique a plutôt tendance à attirer le public.
Sur le cas "Otalia", je pense que les homosexuelles américaines ont vraiment beaucoup misé sur ce soap parce qu'il traitait effectivement le couple d'Olivia et Natalia comme Joey et Dawson, en faisant trainer en longueur pour faire durer le plaisir. Je ne pense pas que ce soit de l'intransigeance, mais de l'impatience, de l'engouement et au final une appropriation totale de la série - que montrent l'ensemble des montages vidéos et des fanfics sur ce couple.
Car la question que moi je me pose, c'est évidemment comment cette histoire a-t-elle été vue par les téléspectateurs ? Au delà, ou en deçà ou indépendamment des intentions de départ, la visibilité produit des effets parfois inattendue. Y compris auprès des publics lesbiens. Il serait en effet assez vain de considérer que nous voyons toutes les choses de la même façon.
Pour autant, en la matière, et même si ce que je dis n'est pas consensuel, je ne pense pas que toutes les conceptions se valent. Je ne remets pas en cause ici la liberté d'opinion ni la liberté d'expression, mais si tout peut se dire, tout ne se vaut pas.
En l'occurrence, je pense que si nous sommes toutes sensibles sur le forum à la question de la visibilité des lesbiennes dans le monde de la culture, ce n'est pas seulement parce qu'on veut se voir représenter et se reconnaître dans des oeuvres, mais aussi parce que la visibilité permet d'exister dans nos sociétés de représentation, en Occident, depuis le XVIIIe siècle.
Désolée d'avoir été un peu longue et peut-être même pas très claire. En bref, sans parler d'intransigeance, je suis d'accord avec ton idée finale de vigilance mais je ne suis pas d'accord avec toi quand tu dis que les séries n'auraient aucune portée didactique au seul titre que leur visée serait le divertissement. Il y a les intentions de représentation et les réceptions de cette représentation.