Le Lesbictionnaire : Interview de l’auteur Jérémy Patinier

Le Lesbictionnaire : Interview de l'auteur Jérémy Patinier

Interview accordée le 27 Février 2012 à Isabelle B. Price pour le site Univers-L.com

Vous êtes un auteur accompli, vous êtes journaliste, vous avez créé le site Very-friendly.fr et fondé les éditions « Des Ailes sur un Tracteur ». Pouvez-vous nous parler un peu  de votre parcours professionnel ?

En effet, j’essaie de me construire un chemin dans le monde de l’écriture sous toutes ses formes car c’est l’un de mes seuls talents mais surtout ma passion. J’ai été journaliste pour Têtu puis pour la presse féminine, sur des sujets culture et société. Et puis l’idée d’un site friendly, c’est-à-dire ouvert à toutes les différences et aussi aux hétéros (rares sont les sites LGBT à l’être) m’est venue avec Audrey-Zoé. On voulait parler de la culture LGBT, mais à tous, et aussi relayer ce contre quoi  tout le monde peut s’insurger, indépendamment de sa sexualité ou son genre. Et puis, de donner des conseils aux parents, amis, collègues des LGBT pour les aider, leur faire partager nos identités, nos cultures.

Comment vous est venue l’idée d’écrire le « Lesbictionnaire : 1000 choses à savoir quand on est lesbienne » ? Qu’est-ce qui vous a motivé dans l’écriture de ce livre ?

Sur Very-friendly.fr, il est apparu que les articles qui parlaient des filles ou pour les filles avaient beaucoup de succès. Nous voulions décliner ce que nous faisions sur le site – partager la culture, parce que nous ne connaissons pas forcément nous même – en livre, pour l’avoir à portée de main, à lire tranquillement : c’est ainsi qu’est né le concept de l’encyclopédé pour les garçons et du lesbictionnaire pour les filles. C’est à 50% du contenu du site, et 50% de contenu inédit.

Comment s’est réparti le travail entre les deux co-auteures, Zoé Audrey et Audrey Bé, et vous ?

Au feeling et selon nos découvertes, nos envies. Et vous seriez surprise-s des sujets qu’un garçon peut avoir envie de traiter sur les lesbiennes ! J’ai une passion pour la découverte, l’inattendu, la sous-culture. C’est ce qui nous a guidés pour surprendre à chaque page plutôt que d’assommer avec un dictionnaire exhaustif.

Ce livre balaie de nombreux sujets incontournables quand on est lesbienne. Comment les avez-vous choisis ? Comment vous les êtes-vous partagés ?

L’idée n’est pas d’être exhaustif, mais de balayer la diversité de la culture lesbienne. On ne peut pas réduire TOUTE la culture lesbienne, c’est pour cela que l’on dit « 1000 choses à savoir quand on est lesbienne », car il y en aurait bien 1 million à savoir. Culture, société, psycho, voyage, santé, homoparentalité, etc… Il y aurait certainement 50 lesbictionnaire à écrire !

J’ai été assez surprise que dans le C de Culture, Mylène Farmer soit en première position. Pourquoi avoir fait ce choix ?

Ce n’est pas un ordre. C’est une icône chez les gays et lesbiennes. Elle permettait de décrire le phénomène icône. De donner des clefs pour comprendre. Si vous avez été surprise, c’est une bonne chose ! Qui sont les icônes lesbiennes, pourquoi ? Ça permet aussi de se poser des questions. Ce que nous faisons, sans vouloir imposer des réponses toute faites sur tout. Ce n’est pas juste de la facilité, c’est aussi un choix.

Les informations sur le PACS sont très intéressantes et on y apprend beaucoup en matière de droits. C’était quelque chose que vous considériez comme indispensable ?

Oui, comme sur le guide de l’homoparentalité, ou le tour du monde des lesbiennes et des unions entre femmes, ce qui n’avait jamais été fait dans un livre. Il fallait aussi que ce soit un livre pratique, pas juste des paillettes et des anecdotes, même si c’est aussi ça notre histoire. Oui je dis NOTRE, alors que je suis gay, parce que je pense que ça fait partie de mon histoire, les débats sur le féminisme et le lesbianisme… Les unes ne vont pas sans les autres.

Quels ont été les retours des lecteurs sur ce livre et sur son homologue masculin, L’encyclopédé ?

C’est notre première aventure dans le monde de l’édition alors nous avons encore à nous perfectionner, autant sur le fond que sur la forme, mais nous travaillons dur pour proposer de nouveaux projets : la transyclopédie sur le même principe, le recueil de chroniques sapphique d’Happyk, de la dixième muse… etc !
Mais c’est vrai que c’est le lesbictionnaire qui a plus (presque le double !) de succès ! On répondait là à une demande certaine d’informations sur la (les ?) cultures lesbiennes.

Pouvez-vous nous parler un peu de la maison d’édition que vous venez de créer : Des Ailes sur un Tracteur ? Pourquoi ce nom d’ailleurs ?

Pourquoi “Des ailes sur un tracteur” : parce que, “quand on veut, on peut !”. Même si nos vies ont des sillons déjà bien creusés, tous tracés, il suffit de s’accrocher des ailes dans la tête pour commencer à être libre, à réaliser ses rêves, à vivre sa vie. Une philosophie qui guidera nos publications.

Quelle est votre ligne éditoriale ? N’importe qui peut vous envoyer un manuscrit ?

Forts de notre première expérience avec le succès de L’encyclopédé et du Lesbictonnaire, nous avons décidé de pérenniser l’aventure en développant dès 2012, des projets de livres LGBT : essais, théâtre, beaux-livres…
Nous misons sur le livre électronique, via les tablettes et itunes, mais faisons toujours confiance au livre papier, grâce à un système de vente en ligne (Amazon, Lulu.com, partenaires…) et quelques points de vente (librairies LGBT comme Les mots à la Bouche, Violette&Co à Paris, Bruxelles, et dans le monde, lors d’événements communautaires…). Grâce à un modèle économique inédit, nous proposerons des livres au prix du marché qui rémunèreront plus raisonnablement nos auteurs.

Vous êtes très engagé au niveau des droits et de la visibilité LGBT. Qu’est-ce qui vous motive ? Qu’est-ce qui vous pousse ? N’avez-vous jamais craint de prendre des risques pour de futurs emplois ?

Je crois qu’à partir d’un moment, quand on est bien accepté par sa famille, par ses amis, qu’on a des idées, des projets, il faut les défendre. On se met « des ailes », sur nos petits tracteurs, dans nos petites vies à priori tracées… Il faut aimer, se battre pour aimer qui l’on veut, et se battre aussi pour faire ce que l’on aime. Les risques, on les prend, mais le plaisir est un bon antidote à la peur.

Que peut-on vous souhaiter pour cette année 2012 ?

Je viens de publier Tintin est-il de gauche ? Astérix est-il de droite ?  aux Editions de l’Opportun et qui trouve un très bon écho chez les journalistes et les lecteurs. Dans ma propre maison d’édition, on publie donc le recueil de chroniques saphiques d’Happyk, de la dixième muse, avec des inédits : ça s’appelle Elles se marièrent et eurent beaucoup de chats persans… Du plaisir à lire, c’est ce que je souhaite à toutes les lectrices d’Univers-L !

Jérémy Patinier

A propos de Isabelle B. Price

Créatrice du site et Rédactrice en Chef. Née en Auvergne, elle s’est rapidement passionnée pour les séries télévisées. Dès l’enfance elle considérait déjà Bioman comme une série culte. Elle a ensuite regardé avec assiduité Alerte à Malibu et Les Dessous de Palm Beach avant l’arrivée de séries inoubliables telles X-Files, Urgences et Buffy contre les Vampires.

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