À Mon Cher Disparu : Interview de la romancière Anne Alexandre

Anne Alexandre

Interview accordée à Isabelle B. Price le 27 Janvier 2015.

Bonjour, pouvez-vous vous présenter en quelques mots pour nos lectrices ?

Je suis née au Puy en Velay, en Auvergne, et mes attaches familiales sont auvergnates. Habituellement pour ne pas donner ma date de naissance je dis que je suis née le jour où le professeur Barnard a effectué sa première transplantation cardiaque (la date est donc facile à trouver…). Je vis à Clermont-Ferrand depuis mes études universitaires en fait. Et je n’ai pas quitté cette ville car maintenant j’y ai mon cabinet d’avocat.

Sur le plan personnel, j’ai su que j’aimais les filles à  l’âge de seize ans et je l’ai assumé assez vite, tant au niveau de ma famille et mes amis qu’au niveau professionnel par la suite. Dire les choses simplement me semble la meilleure façon de couper court aux spéculations et aux interrogations pas toujours bienveillantes.

J’ai pas mal milité dans une association et c’est maintenant par le biais de mon travail que j’interviens pour la cause LGBT.

Depuis combien de temps écrivez-vous ?

J’écris depuis l’enfance : je me rappelle avoir écrit des récits du style le club des cinq et ensuite j’ai écrit des nouvelles policières qui ont servi de base pour les trois romans de Pauline Vogel.  Les cours de droit civil à la fac m’ont inspirée parce que j’ai relevé des dispositions juridiques qui pouvaient faire des histoires policières intéressantes. Je ne pensais pas pouvoir écrire des romans, j’ai donc fait des nouvelles et c’est plus tard, en 1999 que j’ai sauté le pas.

La première scène de La Table du Mort se passe dans un musée pour une exposition de Vierges en Majesté : c’est pendant que je visitais cette expo que j’ai pris la décision d’écrire un roman policier.

Lorsque j’étais présidente de l’association AGILE à Clermont, nous avions fait un débat sur le thème “ Existe-t-il une littérature homosexuelle ?” et nous  avions invité des auteurs dont Geneviève Pastre et des éditeurs. C’est à cette occasion que j’ai fait la connaissance d’Isabelle le Coz (KTM Editions) et tout naturellement lorsque mon manuscrit a été fini, je le lui ai envoyé car elle cherchait à publier des romans policiers.

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans l’écrire de romans policiers ?

Je pense que je compense le fait de ne pouvoir moi-même enquêter dans mon métier, contrairement à l’exercice de la profession d’avocat chez les anglo-saxons. Avoir du poids sur l’enquête est quelque chose qui n’existe pas en France, ce sont les services de police ou de gendarmerie, guidés par le Ministère public ou un juge d’instruction, l’avocat n’a pas beaucoup de latitude dans les investigations opérées.

J’aime beaucoup ce qui est police scientifique et recherches minutieuses.

Je ne fais pas ça, donc j’écris des romans policiers pour pouvoir mener mes enquêtes : mon personnage s’implique d’ailleurs un peu plus que ce qui devrait être dans la réalité, en s’adjoignant par exemple un détective privé.

Et puis, je voulais faire connaître le métier d’avocat, tel qu’il se pratique au quotidien, car je trouve que cette profession n’a pas une bonne image et a une image galvaudée.

Aucun roman policier ne mettait en scène des enquêtes vues par le biais d’un avocat. Connaissant le milieu, je me suis dis qu’en écrivant des romans avec pour héroïne une avocate, je faisais la synthèse de ce que je voulais.

Pouvez-vous nous parler de votre personnage de Pauline Vogel ? Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans l’évolution de ce dernier ?

Il m’est difficile de cacher que Pauline Vogel est un peu moi. Quand on écrit, on s’aide toujours de ce que l’on connaît le mieux. Pauline me ressemble un peu dans le caractère. En revanche tout ce qui concerne sa vie privée et ses expériences professionnelles est totalement inventé (non je n’ai pas séduit une juge d’instruction blonde et je n’ai pas de compagne qui soit décédée).

Quelques anecdotes autour du récit principal sont vraies ou me sont arrivées professionnellement parlant, mais ça s’arrête là.

Je crois que c’était toujours dans l’idée de montrer un autre visage du métier d’avocat qui m’a fait créer un personnage comme elle : je ne voulais pas d’un personnage masculin à l’ego surdimensionné et Dieu sait que dans ce métier il y a beaucoup d’egos surdimensionnés.

Pauline est donc très humaine et nous la voyons se débattre dans ses questionnements professionnels et personnels et je pense, ou du moins j’espère, qu’elle est proche des gens et que les lecteurs (trices) peuvent aussi parfois la trouver attachante et se reconnaître un peu en elle.

Pourquoi avoir choisi d’ancrer vos histoires en Auvergne ?

J’ai lu plus jeune le livre d’entretien qu’a fait François Truffaut avec Hitchcock : celui-ci expliquait qu’il en avait marre de voir toujours les mêmes choses dans les films policiers, l’attente inquiétante au cours d’une nuit pluvieuse, avec pour éclairage un réverbère et la musique oppressante qui va bien. Il avait donc pris le contrepied et avait tourné la fameuse scène de La Mort aux Trousses où Cary Grant avait rendez-vous en plein soleil, sur une route déserte, entouré de champs et allait échapper à un assassinat.

Je n’ai pas la prétention de me comparer à Hitchcock, mais moi aussi j’en ai marre des livres policiers qui se passent à New York ou dans une ville grouillante avec du sang partout, des quartiers sordide,  des vies agitées, etc.

J’ai donc préféré ancrer mes histoires dans des lieux plus paisibles et du coup moins prévisibles. Et plutôt que d’imaginer, un peu par manque de temps et de disponibilité, j’ai choisi Clermont et aussi la campagne environnante.

Et puis c’est beau l’Auvergne…

Avez-vous prévu de continuer les aventures de Pauline Vogel ? D’autres romans ?

Bien sûr, un nouveau roman est en préparation et devrait être prêt pour l’été 2016.

J’ai mis beaucoup de temps à écrire A mon cher disparu pour plusieurs raisons : des soucis personnels et professionnels, et la volonté de faire évoluer mon écriture.

J’avais décidé que Pauline ne serait plus la narratrice, car pour faire connaître les personnages gravitant autour d’elle, il fallait user d’artifices tels que la découverte d’une correspondance, d’un journal intime, d’articles de journaux etc… et après trois romans, j’avais fait le tour des artifices.

Mais écrire à la troisième personne demande plus de travail car il faut créer tous les personnages (car Pauline est devenue un personnage parmi les autres), et il faut réussir à les typer différemment, à ne pas les faire parler de la même manière, à leur inventer à chacun une vie.

Bref, ça demande plus d’efforts et comme j’ai surtout manqué de disponibilité, ça a pris plus de temps que je ne le pensais.

J’ai aussi l’idée d’un autre roman qui ne serait pas policier, mais il faudrait des journées plus longues je crois pour que je puisse tout faire.

De quoi êtes-vous la plus fière ?

Je crois que j’ai été très fière le jour où j’ai terminé mon premier roman, car je pense que c’est ce qui est le plus dur, finir d’écrire un livre.

Ce n’est pas le contenu, je ne me suis pas dit que j’avais écrit un super roman, juste que je l’avais commencé, j’avais mis du temps à l’écrire (quatre ans et demi) et que j’avais réussi à le terminer.

Que peut-on vous souhaiter pour l’avenir ?

De pouvoir continuer à écrire des histoires policières ou des romans qui plairont. Les retours positifs sur ce que l’on fait font un bien fou et motivent énormément lorsqu’on manque de confiance ou que l’on n’est pas trop sûr de soi.

 

Pour information, le livre au format broché est disponible  sur le site officiel de la romancière Anne Alexandre.

A propos de Isabelle B. Price

Créatrice du site et Rédactrice en Chef. Née en Auvergne, elle s’est rapidement passionnée pour les séries télévisées. Dès l’enfance elle considérait déjà Bioman comme une série culte. Elle a ensuite regardé avec assiduité Alerte à Malibu et Les Dessous de Palm Beach avant l’arrivée de séries inoubliables telles X-Files, Urgences et Buffy contre les Vampires.

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