Interview de la scénariste, réalisatrice et productrice Tina Cesa Ward

Tina Cesa Ward

Interview accordée à Jen Kilchenmann pour le site Sosogay.org

Tina Cesa Ward est une réalisatrice primée. C’est aussi la productrice exécutive, la scénariste et la réalisatrice de la bien-aimée websérie Anyone But Me. Pour So So Gay, Jen Kilchenmann a eu le privilège de s’asseoir aux côtés de celle qui a été récompensée par la Writer’s Guild pour en apprendre plus sur la réalisation de films et de webséries et sur l’égalité aux USA.

Parlez-nous un peu de votre parcours ?

Je viens du milieu des films indépendants. J’ai six films à mon actif. J’ai fait un court-métrage qui s’appelle In Their Absence qui a bien marché dans le circuit des festivals et qui m’a valu quelques récompenses. Tout récemment, il vient d’être primé parmi les meilleurs courts-métrages de la décennie au Festival Lésbico MíraLES, ce dont j’ai été extrêmement honorée.

Comment votre websérie Anyone But Me a-t-elle vu le jour ?

De bien des manières, Anyone But Me est le fruit de ma frustration envers l’industrie des films indépendants. Je préparais un gros projet avec quelques acteurs fantastiques et finalement ça ne s’est pas fait. J’en ai été dévastée et un(e) ami(e) m’a suggéré d’essayer sur le web. C’était en 2007, quand il n’y avait pas beaucoup de webséries (re)connues, donc j’hésitais. Mais ensuite j’ai décidé que réaliser des épisodes pourrait être un défi amusant, donc j’ai commencé à y réfléchir puis l’histoire et le personnage de Vivian me sont venus. De là, j’ai continué.

Anyone But Me est très centrée sur le difficile passage à l’âge adulte. Certaines intrigues s’inspirent-elles de votre propre expérience ?

Eh bien, en toute honnêteté, je n’ai jamais été de ces auteurs qui écrivent en puisant dans leur vécu. Mais ça ne veut pas dire que je n’ai pas ressenti les émotions qui sont dans Anyone But Me. L’émotion et les contradictions dans une histoire, c’est ce qui me pousse à écrire – pas forcément le scénario ou les circonstances : pour moi ce ne sont que des outils pour mettre les personnages en porte-à-faux pour expérimenter des émotions vraies et avec un peu de chance raconter un petit peu de ce qu’on ressent tous dans la vie.

À quel point est-ce difficile de financer une websérie ?

Très difficile. Question suivante ! C’est en train de s’améliorer. Davantage de marques sont prêtes à prendre le pari. Mais quand vous faites une websérie, au moins, vous avez une chance de générer des recettes, par opposition à un court-métrage où vous avez très peu de chance de récupérer votre argent. Ou de le faire voir comme il le mériterait. Donc le web est un super débouché pour faire connaître nos histoires.

J’ai cru comprendre que vous et Susan Miller, la co-créatrice d’Anyone But Me, travaillez sur le dernier épisode de la série. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ou est-ce totalement secret ?

Eh bien, c’est encore strictement secret pour le moment. Je vous dirai juste que ça devrait être un final satisfaisant et non pas frustrant.

Nos lecteurs peuvent-ils vous soutenir financièrement ? Comment ?

On vient juste de terminer une très courte campagne d’appel aux dons à l’attention de nos fans. Et grâce à ça, nous sommes maintenant capables de redémarrer la production en février. Mais j’ajoute que si vous allez sur le site d’Anyone But Me, il reste des moyens de nous soutenir. On n’a clairement jamais été en position de refuser l’aide de quiconque.

Grâce à Anyone But Me, Susan Miller et vous avez reçu un Writer’s Guild Award. Quel impact cela a-t-il eu sur vos vies ? Cela a-t-il facilité la sortie de nouveaux projets ?

Ça a été incroyable de gagner le Writer’s Guild Award dans cette nouvelle catégorie des nouveaux médias. La Writer’s Guild mérite beaucoup de louanges pour avoir reconnu la validité de ce nouveau média. Et avoir gagné ce prix ne fait certainement pas de mal quand vous essayez de produire d’autres projets.

Vous avez travaillé sur une nouvelle série qui s’appelle Good People in Love. Pouvez-vous nous la présenter ? Comment vous est venue l’idée ?

Good People in Love est une mini série dramatique qui se déroule le soir où l’État de New York adopte la loi sur l’égalité du mariage. Un repas de fête pour célébrer des fiançailles qui vire en une nuit de manipulations, de décorticage et de révélations lorsque les narrateurs de l’histoire, Scott et Sarah tentent de prouver leurs différentes conceptions de l’amour en prenant en exemple bien malgré eux les deux couples présents et ouvrant ainsi une boîte de Pandore synonyme de problèmes pour chacun d’entre eux.

Dans le fond, il est question de notre émotion la plus complexe : l’amour. Nos deux narrateurs ont des points de vue différents sur l’amour. L’un pour qui l’amour peut tout surmonter et l’autre pour qui l’amour amène la souffrance. Et ce qu’ils ont tous les deux besoin de comprendre, c’est qu’en réalité, l’amour se situe entre ces deux visions et si on peut se frayer un chemin jusqu’à cet équilibre, alors on peut s’en sortir.

Comment avez-vous procédé pour le casting ?

Globalement, comme je le fais habituellement : j’ai passé des coups de fil et fait passer des auditions. Mais j’ai rencontré Renée Olbert il y a un an à Toronto lorsque j’y étais pour participer à un débat. Évidemment, je connaissais Seeking Simone mais en ayant l’opportunité de la rencontrer, j’ai appris à connaître Renée, et une fois que j’ai eu fini le script, j’ai su que je voulais l’embarquer dans l’aventure pour jouer Beth. Je savais qu’elle serait fantastique et elle l’est. Bien sûr, Rachael Hip-Flores incarne Vivian dans Anyone But Me et il y a très peu de personnes que j’adore plus en tant qu’actrice et en tant qu’être humain. Rachael jouera aussi dans une nouvelle série d’aventure SF sur laquelle je travaille actuellement et qui s’appelle Guards of Dagmar.

Quand pourra-t-on visionner le premier épisode de Good People in Love ?

Le 15 novembre. Je vais lancer les trois premiers épisodes un jour après l’autre puis les deux derniers arriveront en décembre.

Pensez-vous qu’il y ait un moyen de réveiller les branches conservatrices du gouvernement américain concernant l’égalité totale ?

Ma plus grande frustration dans ce pays c’est que la majorité des citoyens ne peuvent pas séparer leurs croyances religieuses des droits humains fondamentaux ni reconnaître leur propre hypocrisie lorsqu’il s’agit du mariage en tant qu’institution. Et la DOMA (La Défense de l’Acte du Mariage) en est un bon exemple. Je pense qu’on est très loin de l’égalité complète. Mais j’ai aussi le sentiment que notre pays a fait quelques avancées dans la bonne direction. Le fait que je puisse me marier est quelque chose qui m’émerveille et me rend fière d’être new yorkaise.

Traduction Magali Pumpkin

Interview Originales sur le Site Sosogay.com

Répondre