Tierra de Lobos : La naissance d’une relation amoureuse

Article lié à la série Tierra De Lobos

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Il faut tout d’abord reconnaître le mérite des scénaristes et souligner la qualité de la réalisation. À aucun moment, dans cette série qui rencontre déjà un très large succès, il n’a été question de s’intéresser à la question homosexuelle. Et bien souvent, dans ce genre de série où ce n’est pas le propos, des petites relations lesbiennes interviennent pour contenter l’audimat masculin et cela est toujours traité de manière très distante et peu concernée. Sans parler des fois où bien trop souvent l’on tombe dans un cliché total et complètement avilissant pour la femme… Alors ici je saluerais également les actrices qui jouent ce rôle avec délicatesse, sincérité, sans jamais donner l’impression qu’elles le font parce qu’elles sont obligées de le faire. Pour toutes ces raisons, Tierra de Lobos véhicule une image très positive de l’amour entre femmes et j’encourage vivement toutes celles qui ne la connaissent pas encore de la découvrir sur le champ ! Rendons à César ce qui est à César et crions toutes en cœur un magnifique «Avé » à l’Espagne que nous saluons !

Concrètement, au niveau de la quantité, la série n’accorde pas plus de place à l’histoire entre Isabel et Cristina qu’à n’importe quelle autre intrigue parallèle. On voit leur relation progresser en moyenne un épisode sur deux, donc rien de très intense. Mais ceci est fait de manière très efficace.

Dès l’épisode 2 de la saison 2, l’on voit Isabel arriver en trombe dans la maison close, visiblement à la recherche de quelque chose. De son côté, Cristina est en train de faire sa toilette, nue (forcément), et la porte est entrouverte (forcément). Isabel passant par là croise le chemin de la porte entrouverte et, puisque c’est une petite curieuse, ne peut s’empêcher de jeter un coup d’œil. La scène de nu est à contrejour, ce qui ne nous laisse apercevoir que les courbes du corps de Cristina. La scène se veut esthétique, une douce musique s’élève afin d’en immortaliser la magie, et Isabel se retrouve complètement hypnotisée par le spectacle qui s’offre à elle, tant et si bien qu’au lieu de rester discrète, elle se rapproche de Cristina comme l’aurait fait une pauvre femme ensorcelée par le chant des sirènes. Elle revient finalement à la réalité lorsque Cristina, s’apercevant qu’elle est observée, nullement gênée d’ailleurs, plante ses yeux dans ceux d’Isabel. Comme le veut l’adage « les plus gênés s’en vont », Isabel prend alors la fuite.

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On la revoit quelques minutes plus tard en train de prendre un bain et de repenser à Cristina. Comme si elle découvrait à peine sa sexualité, elle commence à se masturber avant d’être interrompue par sa bonne qui fait irruption dans la pièce. Et là je me dis que, même si la manière dont la série est filmée n’est nullement vulgaire mais bien plutôt pudique, je sens bien que l’avenir risque d’être chaud et de nous réserver bien des rebondissements. Et je n’étais pas au bout de mes surprises…

Dans l’épisode 4 de la saison 2, Isabel est en train de faire des courses avec son employée de maison. Tout se déroule comme prévu jusqu’au moment où elle aperçoit Cristina quelques mètres plus loin. Isabel apparaît à nouveau subjuguée, comme elle l’avait été la première fois. Est-ce le coup de foudre, la stupeur, n’en croit-elle pas ses yeux ? De la même façon, Cristina ne se gêne pas pour la dévisager, mais celle-ci apparaît beaucoup plus sûre d’elle. Si d’un côté Isabel paraît complètement désemparée, prise dans une sorte de transe, d’un autre côté cela renforce l’impression que Cristina sait ce qu’elle fait et sait ce qu’elle veut. En d’autres termes, la faiblesse de l’une renforce l’assurance de l’autre. Reprenant ses esprit, et plutôt mal à l’aise, Isabel prétexte un mal de tête pour s’en aller au plus vite. En quittant l’échoppe, elle heurte (malencontreusement ?) Cristina et s’en prend aussitôt violemment à elle. Sous l’effet de la surprise devant la réaction exagérée d’Isabel, le masque d’assurance de Cristina se craquèle et celle-ci se jette à genou pour l’aider à ramasser les fruits qui se sont échappés. À ce moment précis, l’incompréhension sur le visage de Cristina paraît tellement sincère que son personnage devient touchant. Elle semble beaucoup moins sûre d’elle et l’on peut sentir que l’espace d’un instant, elle doit penser s’être trompée en imaginant qu’il pouvait y avoir une attirance réciproque entre elles deux. Consciente du danger qu’elle courre si Isabel vient à s’en prendre à elle, ce sont des excuses complètement soumises qu’elle lui présente. En aidant Isabel à ramasser ses fruits, leurs mains se frôlent, leurs regards se croisent, et le visage d’Isabel qui était devenu dur et froid redevient doux. Elle semble à nouveau troublée par la femme qui se trouve en face d’elle.

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Un petit mot pour vous parler du fruit qu’elles se retrouvent à ramasser : une pomme ! Si cela n’est pas un signe d’intelligence et de soutient envers nous autres, alors je veux bien rendre mon tablier ! Pourquoi une pomme ? La symbolique de la tentation certes, mais d’un autre côté le second degré ironique envers ces autorités religieuses (très présentes dans la série, et encore à l’heure actuelle dans nos vies), celles qui sont intolérantes et qui n’ont de cesse de pointer du doigt la femme comme pécheresse. Oui la femme est pécheresse, et oui elle est fière de l’être ! Autant, à chaque rebondissement de la série nous nous retrouvons dans l’incertitude face à l’avenir, face à la tournure que prendront les événements, autant, telle une voyante extra-lucide, je vois dans cette pomme la certitude qu’à ce moment là, les carottes sont cuites pour le personnage d’Isabel : elle va enfin connaître le plaisir !

Comme un plaisir n’arrive jamais seul et que la pomme n’était que le commencement, un peu plus tard, en sortant de chez elle, Isabel croise Cristina. Enfin… puisque Cristina semblait attendre à côté de la porte de la maison d’Isabel, il serait peut-être plus juste de dire que c’est Cristina qui croisa Isabel. Isabel, énervée de voir encore Cristina (décidemment, ça fait pas mal de coïncidences ces derniers temps), passe à côté d’elle à toute allure en l’ignorant. Je marque une nouvelle petite pause pour vous parler des costumes. Forcément ils sont censés nous évoquer une époque plutôt western, où les femmes sont en robe et les hommes en costume trois pièces avec chapeau et canne. Je ne peux pas m’empêcher de remarquer qu’au-delà de l’époque, Cristina représente la parfaite tentatrice, prête à faire changer de bord la plus catholique de toutes les gentilles filles. Autant, Isabel porte des robes plutôt simples aux couleurs fades – l’on pourrait penser que puisqu’elle est plutôt garçon manqué elle s’habille en fille par dépit et donc cherche à mettre des robes peu féminines et peu voyantes – autant, Cristina est une lipstick (oui oui, elle ne le sait pas encore mais elle est lesbienne jusqu’au bout des ongles!) assumant sa féminité à fond avec des robes aux couleurs criardes. Il n’y a qu’à voir le petit nœud rouge en satin qui sert à attacher ses cheveux sur le côté, ses boucles d’oreilles à la Esméralda et sa jolie robe rouge et verte qui, va savoir pourquoi, m’évoque une certaine Blanche Neige. Pas le temps de la dévorer des yeux, Cristina se met aussitôt à suivre Isabel, qui lui demande très sèchement de la lâcher. Ça ne ressemble pas au caractère d’Isabel de fuir et de ne pas affronter, aussi, comme si elle se rendait compte elle-même qu’elle n’agissait pas comme d’habitude, elle s’arrête net et ose enfin affronter Cristina.

ISABEL : Pourquoi me suis-tu ? Que veux-tu ?
CRISTINA : Je veux la même chose que toi !
ISABEL : Moi je ne veux rien… rien !
CRISTINA : Tu en es sûre ?

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A propos de Edwine Morin

Relectrice et Chroniqueuse Occasionnelle. Passionnée par les séries télévisées, elle en dévore depuis des années dans tous les thèmes possibles et ses préférences sont si hétéroclites qu'il est difficile d’en trouver les limites. Romantique dans l’âme, elle a succombé au charme d’I Can’t Think Straight et de Loving Annabelle tout en étant fan du travail de Quentin Tarantino.

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